All aboard, un 45 minutes avec: Natifs skateboards

Pour pouvoir skater, on s'entend qu'on a besoin d'une board. Souvent, parce que l'on entend toujours les noms des grosses compagnies américaines, on se tourne précisément vers les boards de ces marques-là une fois qu'on est rendu en magasin. Il y a pourtant tout plein de plus petites compagnies locales qui souhaitent se faire connaître et devenir une référence côté boards. C'est exactement pourquoi j'ai lancé l'idée suivante aux gars de VIDA Skate: pourquoi ne pas faire une série d'articles du type 'Questions&Réponses' avec quelques-unes des ces compagnies québécoises. Apprenons à mieux connaître nos produits d'ici. 

Le premier article de cette série se concentrait sur Technical skateboards. Cette fois-ci, on relance le projet avec la toute jeune compagnie Natifs skateboards. Le setup? Dimanche après-midi, il fait beau et chaud, je suis sur la terrasse de Thomas Villanova en compagnie de ce dernier et de Julien Galarneau, deux des gars derrière Natifs. Cafés, clopes & enregistreuse. C'est un go pour une petite discussion amicale.




Natifs skateboards, c'est tout récent. Quand est-ce que l'aventure a commencée? Comment t'es venue l'idée de créer un brand de skate?
[Julien Galarneau]
Natifs, ça va faire un an le 4 mai. L’envie de créer la compagnie est vraiment partie du skatepark Père-Marquette; à force de voir le monde skater là-bas, de voir qu’il y avait un bon niveau et de voir qu’on était quand même bien soudés.

Moi je skate à Marquette depuis que j’ai 11 ans. Avant, je skatais dans la cour d’école; j’apprenais mes kickflips, j’apprenais mes pop shuvits. À un moment donné, le park s’est construit pis c’est là que tout a commencé. C’est là que j’ai commencé à skater avec mes amis et qu'on a commencé à faire des vidéos. Pis là t’sais, on pensait à faire notre propre marque. On en avait une petite... ‘Krew’ dans le temps... mais après ça on a bien remarqué que ça existait déjà (rires). À un moment donné, j’ai juste oublié le projet et je suis allé faire mes études en graphisme au Collège Salette. J’ai toujours eu un intérêt à travailler pour des compagnies de skate. Je voulais faire du design de skateboards, faire de l’affichage publicitaire aussi. Fecque là j’ai travaillé deux ans à la pige. J’ai appris à plus travailler pour moi, à faire mes propres factures, à développer ma propre business. Je me suis dit pourquoi pas lancer ma petite compagnie à moi, ma petite marque locale, de quoi qui pourrait grossir. J’ai décidé de bâtir Natifs, mais c’est pas parti tout de suite. J’ai commencé à développer le logo, à développer le concept derrière tout ça, mais ça a pris le temps de mûrir pendant peut-être un an, pis là après un an, je me suis trouvé un investisseur. Je me suis enregistré et incorporé. Quand tu vas voir les skateshops après, c’est sur qu’ils vont s’informer sur toi pis si ils voient que t’es enregistré, déjà ils savent que t’es plus sérieux dans ton approche.

Qui sont les fondateurs? Sont-ils tous encore impliqués dans le projet? 
[Julien Galarneau]
C'est moi qui l'a parti, mais c'est avec toute la gang de Marquette en même temps. J’ai vraiment eu des amis qui étaient là pour m’aider, comme Thomas qui s’occupe de la comm'. J’ai Anthony aussi qui va plus s’occuper du côté marketing.


Le nom « Natifs », c’est venu d’où?
[Julien Galarneau]
Natifs, c’est vraiment parti d’un concept que j’ai eu pour représenter les racines des gens. Oui, la marque est dite québécoise, sauf que des natifs, il y en a partout dans le monde. Tout le monde est natif de quelque part, de sa place. C’est un mot que je trouvais rassembleur pis qui représente le skate pas mal. T’sais dans le skate, le monde va skater tout seul, mais tu vas aussi skater en gang, tu vas filmer, faire tes tricks

Vois-tu comme un avantage le fait d'être jeune et d'avoir parti un tel projet?
[Julien Galarneau]
Je suis content de commencé ça jeune, parce que c’est de l’expérience pis je me dis pourquoi pas commencer ça maintenant au lieu de me dire dans 10 ans. Ça sert à rien d’attendre. La compagnie est entièrement financée par moi. J’ai quelques investisseurs, mais c’est vraiment aléatoire. Avec le salaire que je fais, c’est sûr que c’est pas évident, mais avec les planches que je fais je réussis à rentrer dans mon argent. Pour l’instant, c’est vraiment juste pour le fun, je fais vraiment pas ça pour l’argent. On se le cachera pas, le skate c’est pas quelque chose de facile. Je mets beaucoup de mon temps que pour ça pis je le fais pas pour l’argent. Quand tu fais quelque chose pour la passion, c’est là que ça fonctionne.

D'où vient votre motivation de gang et pourquoi le skatepark Marquette en particulier?
[Thomas Villanova]
Marquette c’est le seul skatepark potable du quartier, alors forcément tu y vois toujours les mêmes personnes... si tu commences pas un peu à socialiser, soit tu veux pas, soit c’est dommage parce que j’crois que c’est un sport individuel, mais c’est un truc où la motivation vient du collectif.

Y’a aussi un groupe Facebook ‘Marquette Crew’. On se motive entre nous: il neige et tout? Ouais, on va à tel endroit ou tel autre endroit... Y’a pas mal de gens de partout et qui font de tout, quoi. On est autant des gamins, des ados qui ont 15 ans, que des gens qui ont 30 et qui travaillent, que nous qui sommes entre petits boulots et études. Déjà là, il y a une bonne base de clients pour commencer et une bonne image à projeter.

[Julien Galarneau]
On est une petite marque locale, on n'a pas la prétention de dire qu’on est les meilleurs, sauf que t’sais, je pense que tout part de la vibe que t’as quand tu commences. Je pense que tout le monde a un bon vibe, tout le monde se respecte. Quand on land des tricks, on est tous là s’encourager. C’est pas parce que tu fais juste un kickflip que t’es moins bon. C’est le progrès après ça... T'sais, j’apprenais à un dude à faire son back feeble pis ils les landaient pas... Pis je le vois l’année d’après débarquer à Marquette, pis là il land ses back feebs no stress. Ça donne envie de partager. »

Parle-moi un peu de comment s'est déroulé l'an dernier pour Natifs skateboards.
[Julien Galarneau]
Tout s’est pas mal arrangé sur le tas. On a réussi à avoir un premier événement à Marquette. Moi je connaissais Félix qui travaille au skatepark, qui fait affaire avec la ville dans le fond. Et là il me dit: "hey on cherche un commanditaire pour la compé’ ça te tenterais-tu de donner quelques boards pis des t-shirts?"... J’ai communiqué avec Isabelle Desjardins qui s’occupe de l’événementiel pour la ville pis parle parle, jase jase, elle était vraiment intéressée par le fait qu'on encourage pas mal les jeunes pis qu’on soit vraiment impliqués au niveau du skate, mais vraiment plus à Marquette. 

Après un an, je vois que ça fonctionne super bien. Après les 3 événements qu'on a fait, tout le monde était vraiment stocked. À chaque fois, les organisateurs nous ont dit: "on refera ça l’année prochaine"

[Thomas Villanova]
Cet hiver, on était rendus au stade où il y a avait des boys qui avaient les boards de Julien et qu’on ne connaissaient pas, tu vois. C’est cool, ça veut dire que ça marche un peu au moins.


Quels sont vos principaux détaillants?
[Julien Galarneau]
Rollin. Dans le fond, je suis allé voir Jean-François pis je lui ai parlé. Au départ, il était comme "ah une autre marque…" mais t’sais, voyant qu’on était quand même sérieux dans notre approche et qu’on voulait pas juste faire ça que pour le fun… Je lui ai donné 10 planches au début, pour la première batch, pis toutes les planches se sont vendues. Fecque là je suis allé en porter une autre [batch] pis là, justement la semaine passée, j’y suis retourné pis toutes les planches se sont vendues. Lui il est stocked et vraiment down avec le projet.

Pour l’instant j’ai juste Rollin, mais je travaille au warehouse de Empire, fecque c’est le siège social. Je rencontre souvent les grands boss: Fred, Pat pis Grisé. Justement, j’ai réussi à parler à Fred qui est l’acheteur des boards. Il m’a demandé de lui envoyer un lookbook pis je sais pas trop ce que ça va donner, mais c’est sûr que travaillant là-bas je vais pousser vraiment plus. En même temps, c’est pas mon but ultime. Si je peux continuer à vendre mes planches chez Rollin pis vendre mes planches par-ci par-là, je vais le prendre aussi.

Où et comment se fait votre production? Est-elle plus du genre artisanale ou plus du genre industrielle ?
[Julien Galarneau]
Industriel, mais d’ici. Après m’être enregistré, j’ai fait ma première batch de boards chez Control. Je leur ai envoyé mes designs et ils ont dit okay à produire mes planches. J’ai fait une batch de 100 planches au début pour voir ce que ça allait donner. J’en ai fait dans un bon range, mais finalement il y a des  tailles de planches qui ne se sont pas vendues. Les tailles qui se sont vendues c’est les 8, 8 1/4, ce que tout le monde skate dans le fond. »

Quelle sorte de bois utilisez-vous?
[Julien Galarneau]
100% Érable canadien pur.

Faites-vous produire des boards de toutes les tailles ?
[Julien Galarneau]
Au départ, j’avais fait du 7 5/8, du 7 3/4, du 8 pis du 8 1/4, sauf que là, maintenant, je me concentre plus sur du 8, du 8 1/4 parce que j’ai remarqué que les gens commencent à skater plus large pis je veux offrir vraiment de quoi de skatable. Je suis vraiment intéressé aux shredders aussi, commencer à développer les boards genre les 8 1/2, des boards un peu plus style cruisers, mais qui restent quand même skatables, que tu peux quand même faire un kickflip… t’as un nose, un tail

Quelle tranche d’âge vises-tu côté clientèle? 
[Julien Galarneau]
Je te dirais de 17 à 25 ans et plus. On met pas de barrières pour des gens plus vieux, pis en même temps on va sortir des designs et des largeurs de boards qui vont peut-être moins plaire à une clientèle qui est plus jeune. On va quand même toujours être là pour encourager, donner le spirit. On fera jamais la gueule.

Qui est derrière les designs sur vos decks? Vous arrive-t-il de faire des collaborations avec des artistes locaux pour ces designs? 
[Julien Galarneau]
Je m’occupe du graphisme pour tout ce qui est board, mais aussi affichage sur Facebook. Vraiment, j’essaie d’habiller tout ce qui est Natifs en tant que tel, mais je n’ai pas la fibre business, chiffre et tout ça. Ce qui fait qu’en ce moment j’essaie de me ramasser ma petite équipe pour que moi je puisse me concentrer sur ce qui est graphisme, plus la partie création, ce qui me passionne plus dans le fond. C’est mon côté bohème skateur qui veut créer.

J’ai pensé à des collaborations surtout pour de l’apparel éventuellement. J’ai spotté quelques photographes qui font vraiment des belles photos. J’essayerais de développer des concepts qui font plus "rural". Sinon, j’avais rencontré aussi des dessinateurs, mais ça s’est jamais vraiment développé parce que tu finis par payer le dessin en tant que tel, les droits d’auteur... pis ben en ce moment, je pense que je vais essayer d’utiliser ce que moi je suis capable de faire en dessin pis voir ce que ça peut donner. Éventuellement, je travaillerai avec des artistes qui vivent au Québec pis qui sont vraiment passionnés par ce qu’ils font et qu’ils veulent travailler pour le skate aussi. Ce que je recherche c’est des dessinateurs skateurs qui savent un peu l’histoire du skate. 

Quel est le meilleur moyen pour vous de faire votre promotion? (via vos détaillants, en passant par des riders, les réseaux sociaux, des démos, des ‘giveaways’, des vidéos promo?)
[Julien Galarneau]
En postant des petits vidéos, en mettant des photos sur Facebook, à en parler aussi on finit par attirer l’attention des gens un peu. Des shops comme Rollin’, qui aide souvent les marques plus locales, t’sais ça, ça nous a aidés pas mal.

Pensez-vous éventuellement créer une ligne de vêtements?
[Julien Galarneau]
Ça risque d’être plus du merchandise. Ça va vraiment être pour vendre la guenille, mettre plus d’argent dans le compte. Je veux vraiment que le monde m’associe pour les planches que je fais. Natifs skateboards, c’est avant tout une marque de boards et l’apparel va être de l’a-côté.

Avez-vous déjà un team de riders?
[Julien Galarneau]
Pour l’instant, on a pas vraiment une team en tant que tel. On est plus une gang d’amis qui skatons Natifs, avec des boards Natifs, pis on fait des vidéos par-ci, par-là. On est du monde qui skate street. On a du monde plus tech, du monde qui vont plus shred... Jusqu’à maintenant, même que ce soit pour aider à la marque ou pour en parler, on est toujours rester dans notre petit cercle. Éventuellement, le team va vraiment se développer quand je vais trouver un niveau de skaters qui va être vraiment plus vendeur. Fecque ça risque d’être plus pour l’année prochaine. Cette année, avec tous les gens qui commencent à skater avec nous, je pense que là ça va commencer à plus se développer. Le monde qui va avoir plus de footage, le monde qui veut plus s’impliquer aussi. Ça va déterminer qui je vais prendre sur le team. Ça va aussi être par décision commune, on va en parler pis ceux qui veulent embarquer, qu’ils embarquent. Après ça, on va continuer à faire de la vidéo.

Quels sont vos objectifs pour la prochaine année?
[Julien Galarneau]
Hmm… bonne question ça. Je te dirais développer plus l’image, réussir à être plus présent sur les réseaux sociaux, avoir un site internet, pouvoir vendre sur le site internet aussi, offrir un meilleur service, trouver ou développer des skateurs pis devenir meilleurs en tant que skateboarders.


Avez-vous des événements prévus cet été?
[Julien Galarneau]
Je risque de refaire les 3 événements de l’an passé.  Il va y avoir un barbecue, une compétition de skate, des best tricks… bref le genre d’événements qu’on fait pour la passion du skate. On veut donner envie aux jeunes de persévérer et de devenir meilleurs. 

[Thomas Villanova]
On va faire des petits jams. C’est ça qui est intéressant aussi, tu vois, parce que grâce à ce petit Marquette crew, déjà on peut amener du matos et distribuer quelques trucs comme des casquettes, etc.

Allez-vous sortir des nouveaux designs de boards cette année?
[Julien Galarneau]
En ce moment j’ai un design, je vais avoir d’autres designs qui vont surement arriver cet été. J’ai voulu attendre avant de faire d’autres designs pour que le monde puisse me reconnaître, puissent comprendre la marque. C’est pour ça que j’ai mis le logo sur le nose... pour que ça paraisse vraiment. Éventuellement, on va développer des designs plus créatifs, moins clean cut.

Est-ce qu’on peut s’attendre à voir un film de skate Natifs bientôt?
[Julien Galarneau]
Justement, à la fin de l’été... on commence à travailler là-dessus, je me suis équipé d’une nouvelle caméra pis je fais un peu de montage aussi on the side. On aimerait ça faire un film d’ici la fin de l’été, faire une bonne promo, de quoi qui va nous donner une lancée. Une première au TRH-Bar ça pourrait être pas pire.

Ultimement, où aimerais-tu amener Natifs skateboards?
[Julien Galarneau]
Ultimement, j’aimerais pouvoir offrir un tremplin aux jeunes qui font du skate, fecque vraiment pousser le skate au Québec. Si je peux bouger, m’installer ailleurs... pourquoi pas... essayer de garder Natifs, mais adapter le concept à la place où je me déplace. D’être un peu nomade. Je pense que ça pourrait aller ailleurs.


Si tu avais à décrire ta compagnie par une phrase, ça serait quoi?
[Julien Galarneau]

Une compagnie 100% québécoise, faite par les gens d’ici pour les gens d’ailleurs.


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Crédits photos: Francis Martineau